A notre arrivée à Beijing, on rejoint l’ouest de la ville, là où habite Weijuan qui nous accueille pour 2 nuits. C’est la première fois qu’on fait du couchsurfing alors on ne sait pas trop à quoi s’attendre (Couchsurfing est une plateforme collaborative qui permet à des voyageurs de se faire accueillir partout dans le monde et de rencontrer des locaux). Mais Weijuan transforme vite notre arrivée en une belle expérience, elle nous met tout de suite à l’aise et on communique facilement en anglais. Son appartement est très confortable. Les clichés et quelques documentaires qu’on a pu voir ne laissent pas penser qu’il est possible de vivre dans 80 mètres carrés au cœur du Beijing. On s’installe dans une chambre libre, c’est du luxe ! Notre hôte est vraiment attentionnée, elle nous conseille sur la visite de Beijing et nous aide dans quelques démarches, on dine tous les trois assis en tailleur dans le salon.


Il faut savoir qu’en Chine la moindre démarche se fait entièrement en ligne, et le problème est que beaucoup de sites internet ne sont pas traduits ou ne permettent pas à des étrangers de s’identifier… une fois qu’on comprend les rudiments on se débrouille mais cela demande d’installer toute une panoplie d’applications pour devenir un être connecté à la chinoise. C’est à la fois très moderne et franchement pénible ! Autre point intéressant et parfois troublant : tout ce que vous faites (paiement, réservations de train ou d’hôtel, entrée de musée etc…) est relié à votre identité. La question qu’on nous pose le plus souvent est donc « passeport please ». On le montre sans arrêt, c’est notre laisser-passer. 


Le lendemain de notre arrivée, on attaque la visite de la ville, avec pour commencer le marché des antiquités. C’est un lieu immense où il est très facile de se ruiner, l’achat compulsif vous guettant à chaque recoin. Les boutiques sont splendides, on y trouve du matériel de calligraphie chinoise : pinceaux, encres et supports. Mais aussi des tampons en pierre, directement taillés par les artisans derrière leur comptoir ; beaucoup de pierres pas vraiment précieuses, des peintures, des reliques communistes. Bref, toutes sortes de vieilleries charmantes et plus ou moins antiques qui déclenchent en vous l’envie de refaire toute votre décoration à la mode chinoise et d’y laisser plusieurs SMIC s’il le faut !

La raison aura quand même eu le dernier mot, on ressort avec quelques trésors mais en ayant sauvé les meubles côté budget !



On découvre aussi lors de ce premier jour la culture des parcs publics chinois, où le sport et le bien-être sont à l’honneur. Les personnes âgées y pratiquent la danse, le Qigong, mais aussi le Ping Pong et la gymnastique. On est en semaine alors les plus jeunes doivent être occupés au travail ou a l’école. Il faut dire qu’une belle part de la population appartient à la catégorie « retraités » puisque l’âge moyen de la retraite en Chine est de 54 ans ! Avouez que vous n’auriez pas parié là-dessus ? Il faut dire que ça ne correspond pas vraiment aux clichés associés aux chinois concernant le travail. En flânant dans ces parcs, on sent une forme de grande liberté chez les personnes âgées qui pratiquent leur passion en public, mais bizarrement on ne la retrouve pas chez la partie plus jeune de la population. Voici quelques images de ces activités de plein air :



On se balade aussi dans les quartiers de hutongs, type d’habitation historique de Beijing et d’autres villes du Nord de la Chine. On les trouve dans les rues qui entourent le cœur de Beijing et notamment la cité interdite. Il s’agit de petites habitations abritant des cours intérieurs. Elles ne dépassent pas un étage et les ruelles qui les traversent sont majoritairement piétonnes. Le soir, les hutongs s’animent dans certains quartiers commerciaux. Quand la nuit tombe, les panneaux lumineux des boutiques et des restaurants saturent alors le champ de vision, faisant oublier la présence des arbres, nombreux dans les hutongs et qui forment une jolie canopée le long des ruelles.



C’est dans cette ambiance animée qu’on retrouve Weijuan a une station de métro pour passer la soirée ensemble. Après quelques minutes de marche, on s’installe au fond d’un bar cosy à l’ambiance British. On passe ici une soirée intéressante à discuter de nombreux sujets. Nous échangeons ouvertement sur les clichés qui collent à la peau de nos pays respectifs. On parle donc de la relation que les chinois entretiennent avec le travail, et on découvre qu’elle est en effet ultra compétitive et sélective quand il s’agit de la scolarité et des études, mais que cela devient plus tranquille dans le travail salarié, loin des clichés qu’on entretient parfois en Europe. Pour l’exemple, Weijuan est consultante dans un grand cabinet, ce qui ne l’empêche pas d’avoir des horaires très convenables : 10h-17h , ainsi que des périodes de vacance similaires à la France. Une position qu’elle a pu acquérir après un travail acharné au lycée, où elle travaillait en internat de 8h a 10h du soir avec l’interdiction d’accéder a internet ou au téléphone, et seulement 3 jours de pauses par mois pour voir sa famille. L’établissement était particulièrement dur, ne généralisons donc pas à tous les chinois ! Quand on lui demande ce qu’elle pense de cette culture compétitive, elle nous explique que les chinois la vivent comme une contrainte et que les jeunes envient beaucoup les rythmes scolaires de l’Europe de l’ouest. Mais elle justifie aussi cela d’une manière très pragmatique : « on est tellement nombreux que pour se démarquer il faut faire bien plus d’efforts ! ». En Chine, les parents mettent donc beaucoup de pression sur le dos de leur enfant. Cela se traduit par des cours supplémentaires après les journées d’école classiques (c’est très répandu) ou encore des cours particuliers d’anglais dès le plus jeune âge. Tout est fait pour que le marmot devienne un grand homme, ou du moins qu’il gagne beaucoup d’argent. Ce dévouement des parents semblent presque devenir par moment une forme d’asservissement à l’enfant, qui est un roi au sein de la famille. En comparaison des chinois, les parents français pourraient passer pour des amoureux de l’autorité et de la discipline. Evidemment, on devine aussi que ce fonctionnement particulier est dû à la limitation des naissances.

L’histoire personnelle de notre hôte est d’ailleurs marquante et liée à cette politique. A sa naissance, ses parents biologiques souhaitent un garçon, ils décident de faire adopter leur fille à une autre famille de la même ville. A ce moment-là, la famille adoptive de Weijuan est déjà « au complet » selon la loi chinoise, puisque ces parents ont déjà 2 enfants (la règle est normalement de 1 enfant mais en fonction des métiers des parents, celle-ci peut être élargie à deux enfants, ce qui est la cas pour la mère adoptive de Weijuan qui est institutrice). En adoptant ce troisième enfant, la famille adoptive de Weijuan sort donc du cadre, cela les oblige à payer une lourde amende (l’équivalent de plusieurs milliers d’euros) pour que la petite soit reconnue comme une citoyenne de plein droit, et surtout sa mère est forcée de quitter son poste d’institutrice. Voilà un exemple de parcours hors du commun !

On parle aussi ouvertement de sujets plus « fâcheux », notamment d’écologie et de politique, On comprend mieux à travers les propos de Weijuan la politique expansionniste de la Chine. Globalement, on comprend que le message véhiculé par l’école aux jeunes chinois est qu’ils doivent travailler dur et être solidaire dans le but de redonner à la Chine sa grandeur d’antan. On évoque la spécialisation du pays dans le domaine de la construction d’infrastructures lourdes, tels les ports, aéroports ou barrages. Et Weijuan nous apprend un proverbe chinois qui illustre bien cette politique mené par la Chine à l’international : « Si tu veux être riche, construis d’abord une route ». 

Cette soirée est donc particulèrement enrichissante et nous donne à réfléchir pour un bon moment !


On attaque la journée suivante en allant visiter le Temple du Ciel, un lieu magnifique où les empereurs de Chine venait demander une météo clémente et de bonnes récoltes afin d’assurer la pérennité de leur empire. Les jardins qui entourent le temple sont gigantesques et vraiment agréables, on s’y promène toute la matinée. Le temple est aussi connu pour être une des meilleures incarnations de l’architecture chinoise. Son architecture symbolise la croyance chinoise selon laquelle la terre serait carrée et le ciel rond. Croyance ancestrale évidemment… Ce temple a été construit de 1406 à 1420 sous la dynastie des Ming, aussi responsable de la construction de la cité interdite.



On a la chance d’être accueilli le soir même chez Vera, notre deuxième hôte de Beijing trouvé grâce à Couchsurfing. Elle vit en colocation à l’ouest de la capitale. Nous sommes bien accueillis. Encore une fois on est surpris par la taille du logement de notre hôte, celui-ci doit faire dans les 100m2, de quoi faire baver les parisiens que nous sommes ! On à de belles discussions avec Vera et on aura même la chance d’avoir droit à un petit cours de calligraphie chinoise avec elle. Un bon moment ! 



Evidemment, on ne passe pas par Beijing sans visiter la célèbre Cité interdite. La taille du lieu est impressionnante, elle s’étend sur 72 hectares. Son nom vient du fait qu’elle était la résidence des empereurs et de leur famille, et donc qu’elle était interdite au peuple. Il était même interdit de la regarder, ça ne rigolait pas ! La cité interdite a été construite au début du 15ème siècle, l’empereur et sa famille n’en sortaient quasiment jamais. Il s’agit d’une véritable ville dans la ville, on y trouve de nombreux palais, les plus grands et plus centraux étaient réservés à l’empereur, les parties périphériques permettaient d’accueillir ses favorites, certains conseillers eunuques ou des invités. La taille des constructions principales est incroyable pour l’époque. Nos parties préférées sont celles des jardins et des petites cours, qui offrent des atmosphères reposantes et qui permettent de se figurer la vie quotidienne de l’époque plus facilement que dans les espaces les plus dégagés. 



Avant notre départ en train de nuit, nous avons le temps de profiter des jardins du palais d’été au nord de Beijing. Un ensemble de jardins traditionnels entourant un lac. Le lieu comporte plusieurs temples qui ont du être reconstruits au début du 20ème siècle suite aux destructions des armées expéditionnaires françaises et britanniques. La destruction du lieu n’avait apparemment qu’une raison : dominer et contraindre le pouvoir en place, afin de s’ouvrir les portes de la Chine. En effet, pendant longtemps, seuls deux ports permettaient à la Chine d’avoir des échanges avec le reste du monde, et les marchands européens avaient l’obligation de rester dans l’enceinte des ces ports, l’intérieur de la Chine restait donc un grand mystère. Autre raison de ces événements violents, les anglais ne supportaient pas d’enrichir les chinois à force de leur acheter du thé avec de l’or, et de voir que les chinois n’achetaient aucune marchandise anglaise, considérant poliment qu’elles n’en valaient pas la peine. Susceptibles les British… 



En tout cas, Pékin est vraiment une agréable surprise, nous nous attendions à parcourir une ville fatigante et chaotique, elles se révèle calme et bien organisée. La ville a du faire de gros efforts pour limiter la pollution atmosphérique, en tout cas on a l’impression de prendre un grand bol d’air en comparaison d’Oulan-Bator ! Tous les scooters et une bonne partie des voitures sont électriques et surtout les transports publics sont super efficaces ! On doit aussi dire que les chinois sont vraiment adorables avec nous, d’une gentillesse vraiment touchante. On éveille la curiosité chez eux, nous sommes très observés dans les lieux publics, et c’est même le premier pays où des personnes veulent se prendre en photo avec nous ! Les premières fois c’est surprenant mais on se prend au jeu, on se retrouve donc à poser au milieu de restaurants ou de magasins, parfois dans la rue.


On file maintenant vers Xi’an, ancienne capitale chinoise ! Et on est heureux de retrouver un train de nuit pour se faire bercer en avalant des kilomètres !