Après notre premier arrêt à Hohhot, nous continuons notre route vers la muraille de Chine. On souhaite visiter des tronçons de la muraille peu fréquentés alors on s’éloigne de ceux accessibles depuis Pékin pour rejoindre la petite ville de Gubeikou. C’est à deux heures au nord de Pékin en train. La journée qu’on passe dans le train est un peu longue mais nous finissons par arriver à bon port. Un couple de soixantenaires nous accueille dans leur jolie auberge, nous sommes les seuls clients à cette période alors nous sommes choyés. Lorsqu’ils nous demandent si on souhaite dîner, on répond « oui » avec entrain parce que nous n’avons rien mangé de la journée. Quelques instants plus tard c’est un festin qui débute dans la salle à manger : poulet en sauce avec des cacahuètes, riz blanc collant et une omelette aux tomates. C’est délicieux alors on mange en silence comme des ogres. Enfin pas vraiment en silence parce qu’à côté de nous le couple regarde une émission, un genre de The Voice chinois. Ils mangent des graines de tournesols sans arrêt et font des petits tas dans une assiette avec ce qu’il en reste. Quelques éléments de décoration indiquent qu’ils sont certainement bouddhistes, mais il est possible que ce ne soit que du folklore. En tout cas, l’immense portrait de Mao accroché dans la pièce n’a rien de folklorique ; tiré à quatre épingles il nous observe avec ce demi sourire qui donne un air doux, alors qu’on profite goulument des spécialités de la maison.

On se couche songeurs, car on réalise progressivement qu’on est en Chine, et c’est déjà beaucoup, mais aussi parce que demain matin nous foulerons l’une des merveilles du monde !



Après un réveil matinal et un petit-déjeuner rapide, notre hôte nous emmène au point d’accès de la muraille. Les infrastructures indiquent que l’endroit doit être bondé de touristes à certaines périodes, mais nous sommes quasiment seuls, le pied ! Une marche d’approche d’une petite demi-heure nous emmène au pied de la muraille. La découverte peut commencer. Mais avant de pouvoir en profiter pleinement, il faut d’abord réaliser où on est, ce qui passe par des affirmations idiotes : « Euh Elise, je crois qu’on est sur la muraille de Chine là ». 

L’édifice est évidemment exceptionnel, il parcourt les crêtes des montagnes et reliefs sur des milliers de kilomètres. Le temps est clair alors nous la voyons s'étendre de part et d'autre jusqu'à l'horizon, mais nous savons qu’elle continue à tracer au-delà pour dessiner ce qui fut la frontière Nord de la Chine. Nous sommes entourés de montagnes encore verdoyantes, l’ambiance est silencieuse et l’on se prend à imaginer le quotidien des gardes qui surveillèrent cette frontière, en piétinant cette muraille jour et nuit durant des années. La muraille offre des points de vue magnifiques, s’y promener est plutôt physique parce que les pentes sont abruptes. Il y a donc beaucoup d’escaliers avec de très hautes marches. On y flâne plus qu’on y randonne, le lieu et la vue invitant plus à la contemplation qu’à un vrai effort.



« Pourquoi construire un mur ? » Question simple qui selon le contexte historique peut nous mener à des explications bien différentes. Question qui aurait certainement mérité d’être davantage posée au cours de l’histoire ! Concernant cette fameuse muraille, l’objectif était de se protéger de potentielles invasions des peuples du Nord, notamment venus de Mongolie. Mais construire cette muraille était aussi un moyen de marquer la frontière de territoires nouvellement conquis : « Maintenant, c’est chez moi ». C’est vertigineux de penser que la construction de la muraille a commencé vers 220 avant J-C sous la dynastie Qin. Elle se poursuivit durant les règnes des 4 dynasties suivantes pour finir au XVIIe siècle. Une construction qui s’étale donc sur environ …18 siècles ! La donne a certainement changé aujourd’hui, mais pendant des siècles il était coutumier pour les chinois de considérer le Nord comme la source de toutes les menaces et cette peur leur a fait construire l’édifice le plus long et le plus massif jamais construit par les hommes. Elle parcourt quasiment 7000 kilomètres. Son édification est le fruit du travail forcé, ce qui fait qu’on lui prête la réputation d’être aussi le plus grand cimetière du monde, 10 millions d’hommes auraient péri pour l’ériger. Contrairement à la légende, ils n’ont pas été enterrés au sein des murs mais dans la campagne environnante.



Cette expérience nous fait nous sentir petits, elle invite au calme, à la méditation, des moments comme ceux ci avant d'affronter le milliard d'habitant de la Chine sont precieux. Faire cette visite quasiment seuls nous a offert de beaux moments de contemplation. Nous prenons conscience de la chance que nous avons de pouvoir découvrir de tels endroits.


Après ce moment de découverte historique, on rejoint la gare de Gubeikou pour prendre le train en direction de Pékin. Grâce à la plateforme Couchsurfing, nous avons trouvé une personne pour nous accueillir, Weijuan qui habite dans l'est de Beijing. On est donc pressé de la rencontrer et de découvrir à quoi ressemble la vie à Beijing !