Réveil frais et ensoleillé ce matin, nous avons encore une belle journée devant nous !

Nous commençons par chercher des douches publiques dans le village que nous ne trouverons finalement jamais, la douche devra attendre notre retour à Ulan Bator (on se met à la mode des nomades qui ne se lavent que quelques fois de tout l'hiver).

Nous débutons donc cette journée par la visite du musée archéologique de Karakorum. Ce petit musée vient compléter nos connaissances sur l'histoire de la Mongolie, on y trouve des pièces rares qui nous aident à mieux comprendre les différentes civilisations qui se sont succédées, de longues explications en anglais, des jolis maquettes et pleins d'autres choses encore. Nous ressortons ravis de cette visite !



Mais pas le temps de s'attarder, nous refaisons un dernier tour au temple d'Erdene Zuu et reprenons la route vers le nord. La météo est avec nous pendant ces quelques jours, encore un grand ciel bleu qui nous permet de profiter à fond de ces paysages. Nous entrons dans une zone appelée "le petit Gobi", comme son nom l'indique, c'est un petit bout de désert au milieu de la steppe. Le paysage est digne d'une carte postale, l'horizon est composé d'un fond de montagnes rocheuses, puis d'une couche de dune de sable et d'une autre de plaine enneigée, on ne pensait pas que c'était possible de voir tout ça au même endroit !



Durant l'après-midi, notre chauffeur s'arrête pour demander sa route à un cavalier nomade qui garde son troupeau. L'homme finit par descendre de son cheval, et quelques instants plus tard, notre guide se tourne vers Elise : "Il te propose de monter sur son cheval". Waouh, on a rarement l'occasion de recevoir une leçon d'équitation de la part d'un cavalier mongole !

Les chevaux sont importants pour les mongoles, ils sont un moyen de déplacement à part entière pour les nomades et les habitants de certains villages : rapides et fiables, ils démarrent à tous les coups. Une importance qui est toutefois à relativiser puisque la plupart des chevaux sont élevés pour être mangés ! Les rares chanceux qui ont la chance de ne pas finir à la casserole sont ceux qui se sont illustrés en remportant des courses de vitesse. Les chevaux mongoles doivent donc courir vite pour avoir une chance de vivre vieux.

Physiquement, les chevaux nomades sont courts sur pattes et trapus. Ils font plutôt la taille d'un poney français. Nous avons aussi appris que cette race possède une capacité que n'ont pas la plupart des autres chevaux : une sorte de galop qui permet au cavalier de rester beaucoup plus stable, même debout sur ses étriers. Cela paraît anecdotique, mais c'est ce qui aurait permis aux guerriers mongoles de remporter certaines batailles, en pouvant tirer à l'arc plus facilement du haut de leur monture !


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Un peu plus tard, nous faisons halte prêt d'un amas de roche au milieu de la steppe. Après quelques minutes de marche dans 50 cm de neige, nous découvrons d'anciennes peintures représentant des animaux. Difficile d'identifier la période mais les historiens sont sûrs que ces oeuvres datent d'avant notre ère. C'est un hommage émouvant des hommes qui ont habité ces lieux à la vie qui les entourait. On vous partage quelques images de ces oeuvres :



On croise sur notre route l'installation d'un nomade qui possède des chameaux. Le chameau, comme le cheval, est très apprécié des nomades pour ses capacités à traverser les déserts et les steppes, mais aussi pour sa viande, son lait et son poil (la laine de chameau est réputée pour être très chaude, elle est donc très populaire chez les mongols). La taille de ces animaux nous surprend et nous impressionne, ils semblent gigantesques. Et pour être honnête, on ne pensait pas qu'il y avait des chameaux en Mongolie !


Cet après-midi nous aura aussi permis de randonner dans une zone montagneuse dominant les steppes. Notre guide nous laisse randonner de notre côté (ce qui nous déplait pas parce qu'on est H24 avec lui sinon ! ). On est contents de pouvoir se dégourdir les jambes après beaucoup de km de voiture et puis c'est l'occasion de prendre un peu de hauteur et de profiter d'une vue exceptionnelle.



Et puis le soleil se couche tôt ici, alors il est déjà l'heure de chercher un endroit où crécher pour ce soir. Nous demandons à plusieurs famille avant d'en trouver une qui aura suffisamment de place pour nous accueillir pour la nuit. Il s'agit d'un couple avec leur fils de 8 ans et leur petite-fille de 1 an. Ils vivent dans une belle yourte bien décorée, et plus grande que celle de l'autre famille rencontrée. L'hôte nous emmène faire un petit tour des lieux, il nous présente son cheptel de moutons et de chèvres, son chien, ainsi que sa vache qui vit son ultime nuit avant d'être abattue le lendemain. Décidément, on a vraiment choisi le week-end où toutes les familles préparent leur viande pour l'hiver...

On est heureux qu'il y ait des enfants dans cette famille, cela facilite le lien et rend l'atmosphère encore plus gaie ! Thibault rejoint vite le petit garçon pour dessiner et Elise essaie d'alléger la mère de famille débordée en s'occupant de la petite dernière qui vient de se réveiller.

La soirée passe, nous sommes plutôt observateurs ce soir mais le spectacle devant nous est plus qu'agréable. Vient l'heure du repas et au menu : estomac de vache bouilli, miam miam ! On se force à en prendre un peu pour pas paraître impolis mais c'est vraiment spécial et très difficile à mâcher...


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Excursion - 4ème et dernier jour


Le lendemain matin, après un réveil tardif, nous rangeons rapidement nos affaires. Et avant de nous laisser disparaître, notre hôte nous fait une proposition qu'on ne peut refuser : l'accompagner dans la steppe pour aller chercher son cheval. Il souhaite nous le faire monter. On est évidemment excité à cette idée. Thibault n'est jamais monté sur un cheval alors c'est une belle occasion de s'essayer !

Ce monsieur était vraiment adorable, malgré la barrière de la langue qui a limité notre communication à des politesses gestuelles, nous sentions une volonté sincère de nous accueillir.


En trois jours, nous avons eu le temps de nous éloigner d'Oulan-Bator de plusieurs centaines de kilomètres. Plusieurs heures de routes nous attendent donc pour regagner la capitale. Nous faisons un dernier arrêt pour visiter les ruines d'une ancienne forteresse du 8ème siècle, mais au moment de repartir, nous retrouvons Torga (notre pilote) la tête plongé dans le moteur de son 4x4. Notre véhicule qui s'était montré à toute épreuve semble rendre l'âme, dans un lieu froid et peu hospitalier... Après deux heures de suspense, Torga prouve qu'il n'est pas seulement un chauffeur de talent mais aussi un bon mécanicien, il fait redémarrer la bête. Il était temps on ne sentait déjà plus nos orteils !



La route qui rejoint Oulan-Bator est hallucinante, à chaque fois que nous dépassons un col, une nouvelle étendue de steppes apparaît soudain sur des kilomètres. L'immensité de ce pays nous dépasse ! Après plusieurs heures, nous retrouverons Oulan-Bator, ses embouteillages, sa pollution et son agitation.


On est évidemment très heureux de cette aventure de quelques jours dans des zones naturelles de Mongolie. Cette expérience nous permet de comprendre le mode de vie des nomades de la meilleure manière possible, en l'observant et en le vivant. Après nos échanges et observations, nous comprenons aussi que ce mode de vie particulier et traditionnel se voit chamboulé par plusieurs phénomènes : déjà, le développement de l'agriculture mongole est un problème pour les nomades et leurs élevages. Les terrains agricoles s'étendent de plus en plus, privatisant des espaces qui étaient précédemment ouverts au pâturage. Notre guide nous expliqua également que des conflits éclatent aussi entre nomades et agriculteurs lorsque des troupeaux nomades sont retrouvés dans des cultures, cela pousse les nomades à fuir totalement ces zones de cultures durant les saisons douces, pour les réinvestir durant l'hiver.

Un autre phénomène influe sur la perpétuation de ce mode de vie entre générations : la scolarisation. En effet, en 2008 une loi mongole rendit l'école obligatoire pour tous les enfants entre 6 et 16 ans (c'était déjà obligatoire mais la durée était moindre). L'école obligatoire a bien entendu de nombreuses vertus et on se réjouit de cette adoption. Mais cela vient bouleverser la vie nomade de plusieurs manières : premièrement, les enfants doivent se rendre à l'école, il y a alors deux choix : l'enfant est envoyé dans des sortes de pensionnats de village la semaine ou alors la mère habite dans le village avec ses enfants tandis que le père reste à la yourte. Les familles se retrouvent donc décomposées la plupart du temps. Deuxièmement, le niveau d'éducation ouvre des possibilités qui n'étaient pas envisageables dans le passé : accéder à l'université et à des métiers plus qualifiés qui s'exercent en ville, voire à l'international. En bref, les enfants des nomades ne souhaitent pour la plupart ne plus être nomades.

Après l'agriculture et la scolarisation, il faut noter un autre chamboulement, qui lui n'est pas que négatif : l'intrusion de la technologie et du numérique dans la vie nomade. Chaque camp dispose de ses panneaux solaires, ce qui permet d'avoir la lumière, la télévision et de recharger des smartphones. Les avantages sont indéniables : possibilité de s'informer, de communiquer avec des proches lorsqu'on est isolé. Les inconvénients sont plus ou moins les mêmes que pour toute personne ayant un smartphone : subir des influences extérieurs chronophages et voir son attention happée par des contenus pas toujours très fins...


On voit des mondes s'entrechoquer, les traditions séculaires et les fruits de la modernité se heurtent par-ci tandis qu'ils s'hybrident par-là, nous laissant des visions extraordinaires et vertigineuses : des nomades dissimulant des smartphones dans les poches intérieures de leurs tenues traditionnelles, la chaleur d'un poêle alimenté à la bouse séchée faisant face à une télévision satellite alimentée par des panneaux solaires, des chevaux d'une race centenaire et des toyotas hybrides se reposant côte à côte. Nos vies bruyantes de parisiens et leur vie rude et calme de nomade.

Un vertige à travers l'histoire et la culture, c'est ce que nous offrent ces rencontres et ça n'a pas de prix.