Après ces quelques jours d’excursion dans les steppes mongoles, nous retrouvons Oulan-Bator et la petite guest-house accueillante de Bolod. A notre retour, on se jette dans la douche, il était temps après 4 jours de vadrouille ! Notre guide avait oublié de nous dire que se laver n’était pas vraiment une option, on ne lui en veut pas - peut être parce qu’on a eu le temps de s’accommoder à des manques d’hygiène passagers - mais on suppose que d’autres voyageurs moins habitués l’aurait eu mauvaise… Et d’ailleurs, on ne va s'éterniser sur le sujet, mais chez les nomades il n’y a pas de toilettes. Pourquoi en avoir quand autour de soi on a des kilomètres carrés de liberté et de neige fraiche où faire des trous ?

Les prochains jours à Oulan-Bator vont permettre de préparer notre traversée de la Chine. On arrive à dénicher une agence qui va pouvoir nous faire traverser le Tibet jusqu’à la frontière népalaise pour un prix raisonnable, et un itinéraire se dessine progressivement au fil de nos recherches. Les dates de cette traversée tibétaine d’une semaine combinées à la durée maximale de notre visa chinois font qu’on ne peut pas entrer en Chine avant le 1er décembre sans risquer de dépasser la date du visa. Même si Oulan-Bator n’est pas une ville de rêve (on a eu le temps de vous décrire ses aléas dans un précédent article) nous y resterons donc une grosse semaine de plus !

Cela nous permet quand même de faire d’autres découvertes intéressantes et de passer de bons moments. On découvre notamment des temples bouddhistes magnifiques, mais surtout impressionnants de gigantisme. En passant la porte de l’un d’entre eux, on découvre par exemple une statue du Bouddha d’une hauteur avoisinant les 25 mètres. Des cathédrales catholiques en passant par les mosquées d’Istanbul, les églises russes orthodoxes et maintenant les temples bouddhistes ; notre voyage nous aura montré que les hommes sont prêts à des prouesses quand il s’agit de religion.

Oulan-Bator est une ville intéressante pour quelques jours mais n’offre pas non plus une quantité astronomique de choses à découvrir. On commence à avoir fait le tour, mais ces quelques jours supplémentaires nous offrent du repos, et des temps plus calmes qui nous permettent de lire davantage, de jouer aux cartes, de flâner tout simplement. Il faut dire que flâner dans une ville étrangère est une activité à part entière, c’est gratuit et on se fait rapidement une petite idée sur les vies qui sont menées ici, mais aussi sur les moeurs et les passions collectives. C’est un peu comme mener une enquête sur un peuple mais sans empressement, les indices se dévoilent d’eux-mêmes, au fil des rues, des monuments, de ce qui s’affichent derrière les vitrines.


Ces quelques jours calmes nous offrent quand même quelques dernières découvertes avant que nous reprenions la route. Notamment un beau musée d’art mongole, qui retrace l'évolution de l’art mongole sur quelques siècles. Amusant de voir que les nomades représentés en peinture avec leurs troupeaux correspondent encore parfaitement à ceux qui nous ont accueilli quelques jours plus tôt : mêmes habitations, mêmes troupeaux, mêmes vêtements et mêmes occupations. L’art mongole est très coloré et représente beaucoup de divinités de la culture bouddhique.

On découvre aussi l’Alliance Française d’Oulan-Bator, association présente dans la plupart des capitales du monde et qui permet aux locaux d’apprendre le français avec des cours collectifs ou individuels. Ils organisent également des événements culturels et des projections de films français. On était heureux de pouvoir y trouver une médiathèque en français ! Quand on voyage, accéder à des livres en français devient une rareté ! On repart d’ailleurs de cet endroit en ayant acheté “L’usage du monde” de Nicolas Bouvier. Un récit de voyage bien connu. J’ai bien peur que nos récits de voyage paraissent frêles à côté de ceux de Nicolas, mais tant pis, on va s’intéresser à ce classique !

On passe aussi une excellente soirée au Fat Cat Jazz Club, un petit club de jazz discret, installé dans le sous-sol d’un restaurant du centre d’Oulan-Bator, on se croirait alors transporté dans un sous-sol new-yorkais. L’ambiance est intimiste, le plafond est bas, et les petits guéridons entourés de chaises vous invitent à vous asseoir face à la scène. On découvre un pianiste fou que rien n’arrête et qui se lance dans des improvisations solitaires, une chanteuse à la voix suave, un guitariste hésitant voire même perdu. Bref, un bon moment de musique.

L’avant dernier jour, nous revoyons Uchka dans un café. Nous avions croisé cette femme adorable au musée national et elle était venu nous voir en nous parlant français. En effet, chaque été elle est guide et traductrice pour des français en vadrouille. On la retrouve dans un café et les conversations qui suivent sont passionnantes et nous apprennent beaucoup sur la Mongolie. Par exemple sur les causes et le conséquences de la pollution due au charbon. Notamment le fait que les médecins déconseillent aux femmes d’avoir des enfants durant la période d’hiver qui est la plus chargée en pollution, au risque de perdre leur bébé durant la grossesse. Nous comprenons aussi que malgré une faible démographie (3 millions de personnes), des inégalités importantes existent entre une minorité riche et le reste de la population. Notamment parce qu’une minorité s’est accaparé les richesses du sous-sol mongole. Côté politique, les espoirs de voir la donne changer semblent minces. Il semble qu’il y consanguinité entre la minorité riche et la minorité de politiciens. Les promesses électorales restent donc… des promesses. Pour la majorité de la population, la vie en Mongolie est donc modeste, et il peut-être difficile d’avoir des enfants en raison de ces difficultés financières. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les nomades ne sont pas forcément plus pauvre que les citadins d’Oulan-Bator, c’est même souvent le contraire ! Un nomade possédant un troupeau de 800 bêtes est en fait un homme riche.

Uchka nous partage donc ses envies de revenir à une vie plus simple dans la campagne mongole. Mais avec une maison et une salle de bain, elle ne souhaite pas non plus de la vie nomade, trop rudimentaire à son goût. Elle nous explique que ce changement de vie sera possible quand son fils entrera à l’université et qu’il partira à l'étranger. D’ici là, sa petite famille doit rester à Oulan-Bator.

Après ces quelques jours supplémentaires à UB (Oulan-Bator mais pour les intimes), nous embarquons dans un train de nuit. Direction le désert de Gobi et la frontière chinoise !