Pendant que Thibault prend le chemin de sa retraite de méditation au Kopan Monastery, je rejoins avec excitation un projet de développement d’école et d’internat où je serai volontaire au moins une semaine !


Un peu de contexte : j’ai entendu parler de cette structure sur le groupe Facebook « les français au Népal » (très utile pour tout types de conseils et d’échanges de bons plans d’ailleurs). Le porteur de projet s’appelle Pramod, c’est un homme d’une cinquantaine d’années qui a vécu 15 ans en France mais a décidé de retourner dans son pays pour s’investir dans un projet éducatif qui lui tenait à coeur. Avec sa femme, Saru, et un autre français, ils ont commencés par fonder une école à Katmandou. En réponse à une éducation publique en manque de moyens et à une éducation privée discriminante, leur objectif était d'offrir une formation de qualité à moindre coût pour des enfants de milieux défavorisés, dans une optique d'égalité des chances. La pédagogie est fondée sur l'ouverture d'esprit, la justice sociale, les droits humains et la préservation de l'environnement. Aujourd’hui c’est chose faite pour cette école de Katmandou et on peut dire que cela fonctionne très bien (https://vhmavi.edu.np/). Mais comme ce fameux Pramod regorge d’énergie et de bienveillance, il a décidé de reprendre une nouvelle école et créer un internat dans la campagne népalaise récemment. C’est à ce projet auquel je vais prendre part. 


M’y voilà donc ! Je découvre tout d’abord l’internat où je serais logée pendant le temps de mon séjour. Il s’agit d’un bâtiment perché sur une montagne à 2h00 de Katmandou qui accueille 9 enfants à temps plein et 4 autres externes. Ils sont ici car ils sont orphelins ou ont des situations familiales trop compliquées et instables. Il y a 5 filles et 4 garçons, âgés de 6 à 16 ans. Il y a également deux femmes, Sita et Saraswati qui sont là pour accompagner les enfants au quotidien, s’occuper de l’intendance et veiller au bon fonctionnement du lieu. Je vis aussi avec deux autres volontaires français, Ronan et Tristan (qui sont là dans le cadre d’un projet avec leur école d’ingénieur grenobloise). Tous m’ont accueillis chaleureusement dès mon arrivée. Et puis il y a l’école, à 10km de l’internat. Pramod a récupéré cette école il y a peu et s’y investit corps et âmes pour créer un lieu de pédagogie intelligent et ouverts à tous (basé sur la pédagogie de l’école qu’ils ont déjà créés donc). Actuellement, l’école compte 150 élèves mais Pramod aimerait accueillir encore plus d’enfants dans les prochaines années. 


Mon quotidien se passe donc entre ces deux institutions : 


  • D’une part l’internat, où je passe la majorité de mon temps puisque j’y  dors, j’y mange et je m’y lave. Mais aussi parce que je passe beaucoup de temps avec les enfants à jouer et parler. Durant mon séjour, j’essaye aussi à ma petite échelle de participer au confort et à l’entretien de l’internat. J’ai notamment fait faire par une couturière des rideaux car les chambres en étaient dépourvues et les enfants comme les volontaires manquaient cruellement d’intimité. Et j’ai aussi participé aux tâches ménagères du bâtiment, en lavant les murs des chambres qui étaient sacrément dégueu et commençaient à moisir. Les deux volontaires qui étaient déjà présents se sont aussi lancés dans la création d’un four à pain dans le jardin afin de varier l’alimentation des enfants (qui se résume essentiellement au plat national: dal bath matin midi et soir), quelques briques, des graviers et de la terre et de l’eau en guise de ciment et le tour est joué ! Reste encore à trouver la parfaite recette de pâte à pain ! 


  • Et pendant la journée, je pars à l’école. Le trajet peut s’avérer un peu chaotique, soit j’y vais en scooter avec les garçons, soit c’est l’aventure : je dois d’abord prendre un bus scolaire qui me dépose à mi chemin et ensuite je lève le pouce dans l’espoir qu’un conducteur sympa m’avance sur les prochains km (autant vous dire que j’ai rarement attendu plus de 1min tellement ils sont contents de prendre une européenne en stop) et puis je finis le chemin à pied pour les 20 dernières minutes car l’école est bien isolée. Sacré périple donc. La journée débute toujours par une cérémonie d’introduction qui réunie toute l’école et qui comprend notamment l’hymne national népalais chanté avec fierté par tous les élèves. Ensuite, je rejoins les classes de maternelles, souvent celle de Anjana, l’instit de l’équivalent des grandes sections. Une femme adorable qui m’accueille toujours chaleureusement dans sa classe tout comme ses 16 élèves qui crient tous en cœur « Good morning sister » lorsque je passe le pas de la porte (enfin de la classe, car il n’y a ni portes ni fenêtres dans cette école). Et puis la journée peut commencer : au programme, leçon de népalais puis mathématique et anglais, que j’anime avec grand plaisir. Le tout rythmé par quelques récréations et une pause déjeuner frugale dans l’épicerie collée à l’école. J’essaye d’inciter la maîtresse à parler le plus anglais possible dans sa classe car c’est crucial dans l’éducation népalaise. Et puis j’essaye aussi d’aider Anjana à enseigner de manière un peu moins théorique. Pour vous mettre dans le contexte, ici les professeurs sont peu qualifiés et rares sont ceux qui ont fait des études spécialisées dans l’éducation. Ils se contentent donc de suivre des manuels théoriques un peu limités en faisant répéter aux enfants 1000 fois des phrases toutes faites sans chercher à leur faire comprendre une quelconque logique ou raisonnement. Et puis ils peuvent s’avérer très autoritaires : tapes sur la tête, coup de règle sur les doigts et cris sont de coutumes ici. Un peu à l’ancienne. Alors je suis pas instit et n’ai jamais fait d’études dans ce secteur mais je pense pouvoir dire qu’un enfant de 5 ans a plus besoin d’éveiller ses sens, de réfléchir en groupe mais aussi par lui même, a besoin d’être accompagné si il a plus de difficultés, a besoin d’être encouragé plus que réprimandé si il ne comprends pas etc etc. Bref, c’est un peu ça que j’essaye de faire comprendre à Anjana le temps de mon séjour ici. Enfin j’essaye surtout de lui faire comprendre par l’exemple lorsque j’anime des leçons parce que ça peut être un peu délicat de lui dire tout ça directement. Mais ça semble porter ces fruits car elle m’a dit plusieurs fois « your education is smart » un bon début, reste encore qu’elle essaye de le mettre en pratique. 


Ce fût donc une semaine incroyablement riche en rencontres et en découvertes. J’ai été impressionnée par l’accueil qui m’a été réservé, s’en est presque émouvant parfois. Et puis après des mois sur la route, ca fait du bien de poser ses valises quelques jours et de se sentir utile ! Bref, vous l’aurez compris, ca m’a beaucoup plu et à tel point que Thibault va m’y rejoindre au moins jusqu’à la fin du mois ! :)